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  1. Qu’est-ce que la séduction

Le sens commun, sous-tendu toujours par les caractéristiques de la langue, conduit à envisager deux significations principales pour le mot séduction, compris dans toutes les définitions de ce terme en français : l’action même de sé-duire, c’est-à-dire de con-duire ailleurs, vers soi ; et le résultat de cette action, avec en ce deuxième sens encore deux aspects : l’effet produit par la séduction, et les moyens très spécifiques qu’elle emploie. Les synonymes confirment ces divers aspects. Séduire, c’est obtenir l’adhésion d’autrui ou se l’approprier, voire le fasciner, le captiver, acquérir une emprise sur lui, le maîtriser, voire le subjuguer, l’assujettir, le « sous-mettre » parfois à tous les désirs du séducteur. Tous effets obtenus par l’action de charmer, d’enchanter, peut-être d’émerveiller, ou d’envoûter, d’ensorceler, ce qui suppose d’acquérir un ascendant sur cet autrui. Est sous-entendu souvent, à travers l’image du charme, un moyen immatériel ou irrationnel, magique peut-être, en tout cas mystérieux, moyen sur lequel le discours rationnel aurait peu de pouvoir ; suivant les cultures et les contextes, c’est parfois ensorceler, magnétiser, hypnotiser, beaucoup plus que suggérer. La séduction est un phénomène universel. On en trouve le modèle dans le monde zoologique sous la forme de la fascination, comme celle du serpent décrite par Buffon. Pour général qu’il soit, c’est un phénomène très difficile à saisir. La séduction joue un rôle considérable dans tous les champs des relations humaines. Elle est indispensable à la compréhension des grands phénomènes sociaux et politiques : elle concerne la soumission de peuples entiers à la volonté d’un dictateur ou d’un groupe dirigeant, ainsi que le « culte de la personnalité » ; et l’hégémonie exclusive d’une idéologie et son pouvoir de faire taire toutes les autres, même dans les milieux d’intellectuels supposés cultivés, c’est-à-dire sensibilisés aux dimensions du relatif et de la critique.

 

  1. Le séducteur est un pervers

Le séducteur est une sorte de pervers qui commence toujours par séduire d’une façon ou d’une autre, et profite de cette séduction pour mettre sa victime à sa merci. Dire de quelqu’un qu’il est séduisant, c’est dire qu’il est attractif et qu’il a du charme : séduire, c’est « charmer quelqu’un, l’attirer irrésistiblement en lui plaisant beaucoup », par une sorte d’effet magique. La séduction dans le réel inconscient n’a rien à voir avec le « charmant », du moins au sens courant. La séduction est d’abord un détournement, ce qui rejoint son sens étymologique : la langue ne s’y est pas trompée, c’est mettre quelqu’un « à part », le couper du reste du monde et des autres, pour le faire ne s’occuper que de soi … C’est même induire en erreur, abuser, détourner du bon chemin, ou tout au moins du chemin auquel le séduit, la séduite, est accoutumé.

Le séducteur veut former avec sa « victime » et destinataire un cercle magique, où il exerce une influence irrésistible C’est de cela qu’il jouit, moins de la possession même, que de la possession extorquée, tel Valmont, dans les Liaisons dangereuses, qui choisit, aiguillé par son mentor pervers, la Marquise de Merteuil, une femme incarnant la vertu, épouse d’un homme de loi, ce qui lui permet de faire d’une pierre deux coups, si j’ose dire, détourner une femme vertueuse en l’assurant de son amour, et violer la loi à laquelle elle était mariée. Le Séducteur majuscule, donc, c’est le Diable, « l’être suprêmement mauvais », qui achète, au prix de son âme, celui qui signe le pacte. C’est aussi le serpent biblique de la Genèse trompant l’homme en lui promettant de décider de ce qui est bien ou mal (voir mon article ici) tel un Dieu et qui a ainsi la marque de la bête (voir mon article ici).

Personne ne séduit avec la vérité pure : la séduction agit par un non - savoir et une certaine dose de tromperie, une « ligne de fiction » qui soutient l’illusion et sa jouissance. On ne désire pas l’autre pour son mérite : l’estime n’a rien à voir avec le désir, le libertin le sait bien. Ou alors il s’agit d’un « amour d’estime », un lien durable, dont le manque est absent. La séduction se fonde sur un non - savoir vertigineux : nul ne sait par où il est séduit en soi ou par où on séduit : le désir ne préside pas au savoir, pas plus que le savoir au désir. Le séducteur est donc prestidigitateur, il prend des détours, y compris verbaux (circonlocutions), il est tout sauf direct, il ne va pas « droit au but », et l’atteint d’autant plus sûrement. N’oublions pas que Freud est parti de ce phénomène de l’hypnose, phénomène d’apparence magique.

 

  1. Quand l’orgueil rencontre la dépendance

L’orgueil, c’est être amoureux de l’image que l’on se crée de soi-même, celle d’un moi idéalisé, plus grand que nature hors de la Vérité sur nous-même  (pour plus d’informations, voir mes articles précédents : ici et ici et ici), un ‘moi idéal’ tel un Dieu décidant de ce qui est bien ou mal (voir mon article ici).

Ainsi l’orgueilleux a pour ligne de conduite et comme manière de se représenter ce qu’il est l’image idéale, illusoire et même hallucinatoire qu’il se fait de lui-même (Voir mon article sur la marque de la bête ici). Le manipulateur va se servir du besoin d’’orgueil de ces victimes en choisissant des personnes qui ont besoin d’être reconnues afin qu’elles rentrent dans son jeu. Pour la victime, la relation devient une drogue et les preuves d’amour autant de doses quotidiennes. Elle ne contrôle plus la situation, se laisse complètement porter par cet amour extraordinaire. « C’est là que le manipulateur vient chercher la confidence, identifier sa faille pour mieux la détruire ». Comme par exemple dans la fable de La Fontaine du « Le corbeau et le renard » où un renard croise un corbeau sur un arbre avec un air fier et orgueilleux, tenant un fromage. Le renard est rusé et veut le lui prendre. Il commence par lui faire des compliments çà et là et se demande si son « ramage » (chant d’oiseau) est aussi beau que son « plumage ». Le corbeau tombe dans le piège, ouvre le bec et laisse tomber le fromage. Le renard le prend et dit au corbeau qu’un flatteur vit au détriment de « celui qui l’écoute ». C’est-à-dire que derrière les compliments, il y a toujours un intérêt. L’auteur ne critique pas la flatterie, mais dénonce plutôt la vanité humaine.

La victime est vulnérable car elle est en situation de dépendance affective. Elles ont tellement peur de l’abandon, du vide, de la solitude, elles ont tellement besoin de l’autre pour vivre, qu’elles restent toujours et finissent par accepter l’inacceptable et les manipulateurs s’en repaissent. « Face à un manipulateur, il est essentiel de s’écouter ». La plupart du temps quand une relation dérape, la victime n’a pas écouté son intuition, par envie d’y croire, de vouloir palpiter ». Or notre petite voix intérieure est souvent extrêmement fiable, il faut être conscient de la Vérité sur nous-même. La seule issue est de sortir de la relation ! ».

 

  1. L’imaginaire amoureux, source de manipulation

Quand on regarde une scène sexuelle virtuelle, elle prend corps réellement grâce à cet arrière - fond excitant, et c’est la raison pour laquelle l’image procure une si grande jouissance, avec, en plus, l’excuse qu’il ne s’est rien passé, et donc que l’on n’est pas coupable. Les publicitaires ne s’y trompent pas, eux qui ont colonisé littéralement la toile pour y diffuser des messages fondés souvent sur des images à fort contenu libidinal pour toucher les consommateurs au plus profond d’eux - mêmes sans même souvent qu’ils en aient la moindre idée. Quel est le contenu inconscient

Le Moyen Âge en a fourni de nombreux exemples au temps de la chevalerie, avec l’amour courtois. C’est « la carte du tendre », « le bel amour » qui a été à l’origine de tant de chansons de geste et dont on retrouve le schéma encore aujourd’hui dans tous les grands romans d’amour. Le schéma met la personne courtisée à la merci du séducteur, même si celui - ci proteste de ses bonnes intentions. L’amour courtois est la fin’amor des cathares et des troubadours : la Dame, c’est-à-dire la déesse, présidant à l’initiation chevaleresque et à l’onction royale, après avoir soumis le héros à une série d’épreuves rédemptrices. Il y a quatre degrés dans l’initiation cathare : hésitant, priant, écouté et ami et consiste dans fait de se consacrer au culte d’une dame (le graal) par un vœu analogue aux vœux de religion.  En chevalerie il y avait quatre degrés d’initiation : Le feignaire, le prégaire, l’entendeire et le druz. « Après des épreuves plus ou moins longues », dit Fauriel, « le chevalier était accepté pour serviteur par la dame de son choix ; à genoux devant elle et les deux mains dans les siennes, il se dévouait jusqu’à la mort. La dame lui présentait un anneau et lui donnait un baiser, souvent le seul qu’il devait recevoir et qui s’appelait consolement ». Celui qui se consacrait au culte d’une dame se faisait couper les cheveux ou tonsurer. Le troubadour Peire Vidal, dont il reste quelques œuvres, d’après sa « vida », s’éprenait de toutes les belles dames qu’il voyait et toutes les priait d’amour platonique. Pour attirer l’attention d’une belle mariée ou pas, il a été jusqu’à se revêtir d’une peau de loup et hanter les fourrés du château de l’élue. Cela lui a valu le bâton des paysans. Laissé pour mort, il est alors recueilli par la belle, surnommée la Louve de Pennautier, et son mari qui auraient bien ri de sa mésaventure, mais l’auraient soigné avec bienveillance.

 

  1. Conclusion

La séduction est méthode douce de manipulation qui permet d’atteindre ses objectifs sans brutalité sans même qu’elle s’en rende compte. L’objectif du séducteur ne tient aucunement compte des besoins et des intérêts de la personne manipulée. Elle tend même à les saboter. Et pour cause, la manipulation est depuis longtemps dénoncée par l’Histoire et la sociologie : propagandes, dictatures, sectes… et est symptomatique des personnalités narcissiques. La manipulation a mauvaise presse, elle nous choque parce qu’elle insinue le sentiment que nous ne serions plus maîtres aux commandes de nos pensées, de nos comportements, de nos vies. Comme le dit si justement Philippe Breton, « la manipulation consiste à “entrer par effraction” dans l’esprit de quelqu’un pour y déposer une opinion ou provoquer un comportement sans que ce quelqu’un sache qu’il y a eu effraction ». L’espèce humaine à l’esprit crédule : elle aime croire aux promesses, comme on croit aux prouesses du magicien. C’est la raison pour laquelle la séduction prospère au détriment de la fade Vérité sur nous -même qui ne promet rien.

Lutter contre l’illusion de la séduction est un combat spirituel, celui de l’humanité contre le Serpent des origines. Tels de sournois machinistes de théâtre déployant des décors trompeurs, les démons peuvent déformer notre imagination, nous séduire et au final nous tromper. Le mal devient attirant, la transgression banale, le bien ou Vérité très peu désirable. La séduction est une sorte d’emprise qui peut faire souffrir rapidement lorsque la réalité se confond avec le fantasme. La déception est tellement immense, quand la réalité revient et la Vérité resurgit toujours à un moment.

 

  1. Sources :

 « Le Secret des troubadours : De Parsifal à Don Quichotte » de Péladan Joséphin

« La séduction » de Benjamin Abdessadok,

https://www.famillechretienne.fr/38058/article/imprenable-5-comment-le-diable-se-sert-de-votre-imagination-pour-vous-tromper

https://www.scienceshumaines.com/la-main-du-diable_fr_44344.html

https://sherpas.com/blog/corbeau-renard/

https://www.psychologies.com/Moi/Moi-et-les-autres/Relationnel/Articles-et-Dossiers/Love-bombing-de-la-seduction-a-la-manipulation

https://www.cairn.info/revue-dialogue-2004-2-page-19.htm

https://www.cerveauetpsycho.fr/sd/psychologie-sociale/la-science-de-la-seduction-8006.php

https://www.santemagazine.fr/psycho-sexo/psycho/manipulation-mentale-savoir-la-reconnaitre-et-la-dejouer-1039530

 

 

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